Midam, le papa de "Kid Paddle" et "Game Over", accusé de viol
L’un des grands auteurs belges de BD, dont les albums ont été vendus depuis trente ans à plusieurs millions d’exemplaires, comparaîtra devant le tribunal correctionnel de Bruxelles. Présumé innocent, il est accusé de viols par une plaignante. Il dément.
- Publié le 29-04-2024 à 06h41
Alors que le parquet avait initialement tracé des réquisitions de non-lieu, la chambre du conseil a ordonné le renvoi de Midam, dessinateur belge au succès international, père des sagas à succès Kid Paddle et Game Over, devant le tribunal correctionnel. La plaignante, consultante en communication, s’était constituée partie civile, pour viol, en 2021. Dans sa plainte, elle affirme avoir dû entretenir des relations sexuelles non consenties avec le dessinateur. Les faits se seraient déroulés au domicile de ce dernier, après un souper, alors qu’elle se serait trouvée dans un état second possiblement consécutif à la prise de substances administrées à son insu. Midam, de son côté, dément.
La plaignante avait fait la connaissance de celui qu’elle accuse l’année précédente, dans le cadre professionnel. Le 26 juillet 2021, un souper à trois était organisé au domicile du dessinateur, dans les faubourgs bruxellois. Elle relate qu’avant l’arrivée du collègue, Midam aurait insisté pour visionner une certaine vidéo. On y voyait une femme en train de se dévêtir. Le dessinateur âgé aujourd’hui de 60 ans précisait que la personne, qu’il avait filmée lui-même, était une voisine du quartier. Le collègue qu’on attendait est ensuite arrivé. Tout au long du repas, la plaignante, prévoyant qu’elle devrait prendre le volant, a bu de façon très modérée, sans même achever le dernier verre que leur hôte servait. La soirée s’achevant, le collègue a quitté la villa, laissant seuls le dessinateur et son accusatrice. Cette dernière, voulant à son tour prendre congé, relate s’être alors sentie subitement mal.
Dans une sorte d’état second, elle se serait assise dans un canapé, le temps, pensait-elle, de reprendre des forces. Le dessinateur aurait encore mis une vidéo. Elle gardait le souvenir d’un film d’horreur. Elle aurait alors perdu connaissance.
”Trou noir” et rapports sexuels non consentis
Quand elle est sortie plus tard de ce qu’elle décrit comme un “trou noir”, elle se découvrait, nue, allongée sur un lit, avec cet homme sur elle qui la forçait. La jeune femme dit avoir subi d’autres rapports sexuels non consentis, plus tard dans la nuit, qu’elle n’avait pas les moyens d’empêcher. Elle aurait finalement quitté la villa vers 5-6 heures du matin, anéantie. Les deux travaillaient sur un projet, depuis plusieurs semaines.
La plaignante rapporte encore que le sexagénaire lui avait déjà fait des avances par le passé, qu’elle avait refusées, lui signifiant, dit-elle, de la façon la plus nette qu’elle ne souhaitait pas engager une relation.
Le parquet confirme le procès, Midam, “serein”, dément l’accusation de viol
Contacté, le porte-parole du parquet de Hal-Vilvorde a pu confirmer que “le dossier sera traité par le tribunal correctionnel francophone de Bruxelles”, l’inculpé ayant souhaité être jugé dans la langue française.
Début 2022, l’auteur de BD, dont nous escomptions alors la réaction, après avoir consulté son avocat, avait répondu : “Je suis choqué d’apprendre l’existence d’une plainte à mon encontre via la presse. Je n’en avais pas connaissance et je ne comprends pas ce qu’on pourrait me reprocher et je suis serein”. Dans sa déposition, Midam, à qui les enquêteurs demandaient s’il avait administré des substances, avait répondu par la négative non sans préciser que la plaignante avait par contre consommé pas mal d’alcool. La partie civile pourrait déduire qu’il admettait implicitement ainsi qu’il la savait dans un état de vulnérabilité. Le dessinateur a le sentiment aujourd’hui qu’un élément extérieur – la personnalité du témoin parti le premier – a pesé dans la décision de le renvoyer en procès alors qu’au départ, le parquet demandait le non-lieu.
Le collègue parti le premier a également été entendu. Lui qui connaît la plaignante a relaté qu’effectivement, elle ne se trouvait à ses yeux pas dans son état normal. Midam est, et reste, à ce stade, présumé innocent. Son conseil a réagi hier midi. Ce dossier, relate Me Laurent Kennes, “est un non-dossier”, un dossier “dans lequel il n’y a rien”. Me Kennes confirme que lors du règlement de procédure, et alors que le parquet requérait le non-lieu, la chambre du conseil ordonnait le renvoi de son client en correctionnelle “parce que nous avions affaire à un magistrat qui, dans les dossiers de mœurs, le fait systématiquement, ce qui, à mes yeux, pose d’ailleurs problème”.
”Mon client, poursuit Me Kennes, n’est pas un aventurier du sexe. Il n’avait plus eu de relation sexuelle depuis un temps. Il l’a draguée. Elle et lui avaient bu. Nous sommes ici dans une relation entre adultes. La soirée se terminant, et alors qu’ils se retrouvaient à deux, ils se sont embrassés. Il a proposé la chambre d’ami, ce qu’elle a refusé. Elle voulait aller dormir avec lui.”
La jeune femme est partie au matin. “Elle envoyait alors un SMS, l’accusant d’avoir mis quelque chose dans son verre. Un mois plus tard, quand elle déposait plainte, il n’y avait plus moyen de faire un test pour établir que rien n’avait été mis. Quand mon client a été interrogé, les policiers disaient déjà qu’il n’y avait rien dans ce dossier. En chambre du conseil, on est tombés sur ce juge qui renvoie systématiquement l’inculpé devant le tribunal. Nous n’avons pas su interjeter appel. On va salir la réputation de mon client qu’on va taxer de violeur avant même d’avoir été jugé et alors qu’il n’en a pas du tout le profil. J’ajoute qu’on est aussi très surpris de la réaction de la jeune femme “. L’affaire est fixée devant la 54e chambre correctionnelle de Bruxelles, précisait, enfin, Laurent Kennes.
La plaignante, qui maintient les accusations, a fait choix de la pénaliste Nathalie Buisseret.